Beaune ville d’aviation !
Beaune ville d’aviation !
Voler un rêve millénaire !
Il y a deux cent cinquante ans environ que l’homme est monté dans les airs et un peu plus de cent ans qu’il sait s’y diriger .Comme leurs contemporains, les beaunois se sont passionnés pour les progrès de l’aéronautique. Certains d’entre eux ont inscrit leur nom dans cette épopée .Ces héros des temps modernes ont leur quartier : le quartier des chilènes, deux femmes y ont trouvé place : Elise Delaroche et Maryse Bastié .
Virevoltant entre nuages et soleil, les oiseaux narguent les terriens depuis la nuit des temps .Le plus grand ingénieur de la renaissance Léonard de Vinci, a conçu de fantastiques machines volantes .Beaucoup de ces machines ne verront pas le jour, faute de matériaux adéquats .La voie des cieux restera un secret bien gardé jusqu’au XVIII siècle !
C’est paradoxalement parce qu’il n’a plus cherché à imiter l’oiseau que l’homme a été capable de s’élever dans les airs.
A partir des années 1770, les progrès de la chimie mettent en évidence un « air plus léger que l’air ». L’idée est donc apparue que l’on pouvait tirer parti de la différence de densité entre les airs pour réaliser une action jusqu’ici impossible : vaincre la pesanteur. Férus de sciences, Etienne et Joseph Montgolfier, mettent au point un premier prototype de ballon et font une démonstration publique à Annonay. C’est devant une foule en délire et en présence du roi qu’Etienne de Montgolfier réitère son expérience le 27 aout 1783.
Au même moment une autre expérience se met en place sous la houlette d’un professeur de physique : Alexandre César Charles.
Les procédés de Charles et de Montgolfier sont différents mais l’essentiel est là : voler n’est plus un rêve ! L’aérostation (c’est ainsi que l’on l’appelait) est née.
Ces expériences sont suivies très rapidement par des vols habités, on en compte une vingtaine dès 1784, l’académie des sciences de Dijon avec Guyton de Morveau réalise un aérostat à gaz inflammable afin de poursuivre l’exploit des frères Montgolfier.
Enthousiaste Alexandre Charles, passagers de l’un de ces vols, s’exclame : »le soleil s’est levé pour moi tout seul.
Au XIX siècle : On continue de voler en utilisant les propriétés du gaz, tel le héros de jules Verne avec son tour du monde en 80 jours, vous souvenez-vous sans doute de la célèbre image de Gambetta quittant Paris assiégé en ballon !
On imagine d’autres machines pour imiter l’oiseau mais sans grand succès .Etienne Jules Marey dont les recherches ont porté entre autre sur le vol des oiseaux comprend qu’il faut orienter la recherche vers d’autres voies : »il faut imiter le vol de l’oiseau et non l’oiseau » .disait-il.
Le tournant décisif vient avec les premières applications de la machine à vapeur à l’aviation puis avec l’introduction du moteur à explosion.
En 1890 Clément Ader quitte le sol à bord d’un aéroplane sous la seule impulsion de son moteur. L’aéronautique est née !
Cette nouvelle invention suscite un engouement sans précédent,
Le public se presse pour assister aux meetings aériens .Beaune devient ville d’aviation en 1913, par une décision ministérielle créant une halle d’atterrissage «, l’emplacement choisi est le terrain de manœuvres du 16e régiment de chasseurs (l’actuel quartier du forum des sports) .les cavaliers des 16 e chasseurs laissent la place à l’aéroplane, exit le cheval, la modernité est en marche.
En 1925 quelques passionnés forment l’aéroclub beaunois. L’année 1935 voit l’essor de l’aviation de tourisme, les avions sont de plus en plus nombreux sur le terrain de Beaune, réputé être le meilleur aérodrome de Bourgogne .On y remarque un certain Edouard Joly aux commandes de son avion appelé « le pou du ciel ».
C’est en participant à des fêtes aériennes qu’il rencontre celui qui sera son ami de toujours et son associé : Jean Délémontez .Les deux hommes mettent au point l’avion qui sera le plus vendu dans les années 50 : le JODEL (une plaque est apposée sur leur maison 37 route de Seurre).
En 1976, ce terrain enclavé dans les vignes et trop proche des collines de la côte n’est plus adapté .L’arrivée de l’autoroute accélère son déplacement sur un terrain situé à Challanges.
L’ancien terrain est devenu un lotissement mais l’aviation ne l’a pas quittée pour autant .Arpentez ses rues et comme dans une encyclopédie à ciel ouvert vous retrouverez les grands noms de l’aviation : Blériot qui traverse la manche en 1909, Mermoz, la figure légendaire de l’Aéropostale, surnommé l’« Archange », Guynemer l’un des pilotes de guerre français les plus renommés de la Première Guerre mondiale .Roland Garros qui réalise la première traversée de la méditerranée ,et bien sûr : Clément Ader précédemment cité .
Sans sous-estimer les mérites de leurs homologues masculins, deux pionnières méritent plus particulièrement notre attention : Elise Delaroche et Maryse Bastié.
Jeune actrice Elise Deroche (1886 – 1919) a changé son nom en celui de baronne Raymonde de Laroche, qu’elle estime plus brillant pour le théâtre. Avide de gloire, elle décide de voler. Troquant ses sémillantes toilettes et ses chapeaux à voilette pour un gros chandail et un passe-montagne, elle prend ses premières leçons de pilotage et obtient le premier brevet de pilote féminin le 17 mars 1910. Elle bat les records féminins d’ALTITUDE et en sera félicitée par le tsar Nicolas II. Mais sa gloire sera de courte durée, elle se tue au cours d’un vol d’essai, sur le terrain du Crotoy, le 18 juillet 1919.
Maryse Bastié, aviatrice française, gloire du sport, née en1898 , fut une aviatrice accrocha de nombreux records à son palmarès. Encouragée par Mermoz, qui lui a fait faire avec lui un aller-retour, elle s’attaque à la traversée de l’Atlantique Sud. Un mois à peine après la disparition de Mermoz, le 30 décembre 1936, elle traverse l’Atlantique de Dakar à Natal, seule à bord de son avion.
Lors de l’offensive allemande de mai 1940, elle offre ses services à la Croix-Rouge, notamment auprès des prisonniers français regroupés au camp de Drancy. Lors du départ d’un train vers l’Allemagne, elle est bousculée par une sentinelle allemande et se fracture le coude droit. Elle en garde une invalidité et ne pilote plus. Sous couvert de son activité à la Croix-Rouge, elle recueille des renseignements sur l’occupant En 1951, elle entre au service de relations publiques du Centre d’essais en vol. Lors d’une de ses missions, elle trouve la mort dans l’accident d’un Noratlas, après un meeting aérien à l’aéroport de Lyon-Bron, le 6 juillet 1952.
Souvenons-Nous, au début du XX siècle, les femmes ne votent pas encore, et rares sont –elles au volant d’une automobile. C’est peu dire qu’il leur a fallu déployer de la ténacité pour être aux commandes d’un avion .Conspuant les préjugés sur le « sexe faible » ,ces femmes ont su voler de leurs propres ailes (au sens propre comme au sens figuré )et ont ouvert des possibles à d’autres femmes .
L’aventure de l’aviation à Beaune n’est pas terminée, une entreprise travaille toujours avec le nom de JODEL.
L’aéroclub Beaunois compte quelques 80 adhérents .Il y a toujours des passionnés pour faire faire un baptême de l’air et pourquoi pas vous initier aux joies du pilotage Le rêve s’est certes quelque peu émoussé, voler est devenu plus commun. Le virtuel pourrait laisser croire que l’on s’offrir des sensations ….en restant dans son fauteuil comme le regrette Me Lucette Tupinier Présidente de l’aéroclub de Beaune.
Mais rien ne remplacera l’émotion que l’on peut ressentir « en voyant le soleil se lever pour soi tout seul » .Des premiers vols en aérostat à la fin du XVIII siècle à ce début du XXI e, les passionnés d’aviation empruntent les mêmes mots pour décrire l’émotion que leur procure le vol entre ciel et nuages ,et sans doute Ni Elise Delaroche ni Maryse Bastié ne démentiraient .
Véronique MANGOLD
NB : pour en savoir plus, on peut aller consulter aux archives municipales le mémoire de
Jean-Baptiste Ducret « l’aviation en côte d’or : 1784-1996 »
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